Crédit image : WNBA |
Les joueuses de la Women's National Basketball Association (WNBA) ont annoncé leur décision de se retirer de la convention collective (CBA) en vigueur depuis 2020, une décision qui pourrait redéfinir l'économie du basketball féminin. Ce retrait, effectif à la fin de la prochaine saison au lieu de 2027, ouvre la voie à une année de négociations qui pourraient être délicates.
Un système de plafond salarial contesté
L'un des principaux enjeux des négociations sera le plafond salarial, un sujet qui suscite des débats au sein de la ligue. Terri Carmichael Jackson, directrice exécutive du syndicat des joueuses (WNBPA), a déclaré : « Quand on regarde le business, les joueuses sont les seules à avoir des limitations. Nous devons parler du système de plafond salarial et en proposer un nouveau ». Actuellement, le plafond salarial dans la WNBA empêche les joueuses d'accéder à des rémunérations plus élevées, malgré la croissance des revenus de la ligue.
Elles souhaitent obtenir une part plus importante et garantie des revenus de la ligue, allant jusqu'à la possibilité de recevoir des parts de propriété dans la WNBA ou dans des franchises spécifiques. Jackson a affirmé : « Je pense que tout est sur la table ». Cela pourrait inclure des mécanismes de partage des revenus similaires à ceux en vigueur dans la NBA, où les joueurs reçoivent 51 % des revenus de la ligue.
Une préparation minutieuse
Pour préparer cette transition, le WNBPA a commencé à organiser des réunions avec des experts et des joueuses de haut niveau dès l'année dernière. Ce processus a permis d'examiner les options et d'établir des priorités claires. Ces discussions ont continué tout au long de la saison, et lorsque le vote a été ouvert aux membres du comité exécutif et aux représentants des équipes, presque tous ont soutenu la décision de rompre la convention, soulignant un engagement collectif fort.
Jackson a notamment discuté de cette décision avec Breanna Stewart et Napheesa Collier, vice-présidentes du syndicat, juste après leur finale de la WNBA. « Elles ont dit : "Allons-y, nous sommes prêtes" », a-t-elle rapporté. En amont de cette annonce, Jackson a également pris soin de communiquer avec Cathy Engelbert, la commissaire de la WNBA, sur la nécessité d'une collaboration pour un changement transformationnel. « Nous avons discuté de la nécessité de travailler ensemble pour un changement transformationnel », a-t-elle souligné.
L'évolution du paysage économique
Le paysage économique de la WNBA a considérablement évolué depuis la signature de la dernière CBA en 2020. La valorisation des équipes a explosé, avec des augmentations allant jusqu'à 20 fois leur valeur initiale. Par exemple, des franchises comme les Las Vegas Aces et les New York Liberty ont vu leur valeur augmenter de manière significative, en partie grâce à des investissements massifs de propriétaires. La ligue avait également levé 75 millions de dollars, et la valeur de ses droits médiatiques a triplé, atteignant un nouveau record.
De plus, trois nouvelles équipes devraient rejoindre la ligue au cours des deux prochaines années : Golden State, Toronto et Portland. Plus de dix autres villes espèrent même accueillir une seizième franchise. Ces développements montrent non seulement la popularité croissante de la WNBA, mais aussi le potentiel inexploité du marché.
Cependant, malgré ces avancées, le modèle économique reste fragile. La WNBA génère environ 200 millions de dollars de revenus par an, mais seulement 10 % de ce montant est alloué aux salaires de base des joueuses, dont le salaire moyen s'élève à environ 100 000 dollars. Les stars peuvent également bénéficier de contrats de marketing, mais la ligue n'a pas encore atteint la rentabilité. En effet, des rapports ont indiqué que la WNBA et ses équipes ont perdu entre 40 et 50 millions de dollars cette année, ce qui pose des questions sur la viabilité économique à long terme.
De nouveaux défis à relever
Les joueuses ne se contentent pas de réclamer de meilleurs salaires, elles aspirent également à des améliorations significatives en matière de conditions de travail. Parmi les demandes, on retrouve l'instauration de normes de voyage et d'installations améliorées, notamment la pérennisation du programme de vols charters instauré cette année. Ce programme, bien qu'initialement temporaire, a été salué par les joueuses comme un pas vers de meilleures conditions de travail.
Elles envisagent également d'élargir les avantages liés à la retraite et d'augmenter le soutien aux familles, des questions particulièrement cruciales pour les athlètes qui jonglent avec les exigences professionnelles et personnelles. Par exemple, des mesures visant à garantir un congé parental adéquat et des services de garde d'enfant pourraient être incluses dans les négociations.
Des enjeux sociaux et politiques
Les discussions autour de la nouvelle CBA pourraient également révéler des clivages entre les propriétaires, notamment ceux qui investissent beaucoup dans leur équipe et ceux qui restent plus prudents. Ce dilemme économique reflète des questions plus larges concernant l'égalité des sexes dans le sport. Les joueuses de la WNBA ont souvent été à la pointe des luttes pour l'égalité et les droits des femmes dans le sport, et elles sont bien conscientes que leurs succès peuvent inspirer d'autres ligues.
Le WNBPA se prépare déjà un processus potentiellement long et difficile, rappelant que les batailles syndicales ont jalonné l'histoire de la WNBA depuis sa création en 1996. Des grèves ont été évoquées dans le passé, et les joueuses ont parfois menacé de jouer dans d'autres ligues si leurs demandes n'étaient pas satisfaites. Les propriétaires, pour leur part, pourraient répondre par des mesures de rétorsion, y compris la menace d'annuler des saisons ou même de fermer certaines équipes.
Des comparaisons avec d'autres ligues
À titre de comparaison, la NWSL et ses joueuses ont opté pour une renégociation discrète de leur CBA bien avant son expiration, annonçant une extension cet été et évitant ainsi un conflit public entre propriétaires et athlètes. Jackson a salué cet accord, notant que le WNBPA partage la même conseillère juridique, Deborah Willig, avec le syndicat de la NWSL. « C'est maintenant à notre tour de faire avancer tout le monde avec les gains que nous obtiendrons dans une nouvelle CBA », a-t-elle déclaré.
Cette dynamique contraste avec celle de la WNBA, où les tensions ont souvent été plus visibles. Jackson a même critiqué des commentaires de la commissaire Engelbert lors d'une apparition sur CNBC, pointant des divergences dans la communication entre les parties.
Vers un changement transformationnel
Les joueuses de la WNBA se tiennent prêtes à défendre leurs droits et à revendiquer une place plus équitable dans le paysage sportif. Jackson a évoqué la nécessité d'un CBA transformationnel, insistant sur le fait qu'après une année révolutionnaire pour basketball féminin, il serait inacceptable se contenter de moins. Alors que les négociations approchent, toutes les parties impliquées devront s'engager à travailler ensemble pour assurer un avenir prospère pour le basket féminin.
Le succès des négociations dépendra la volonté des propriétaires de la WNBA de reconnaître la valeur des joueuses et de s'engager à investir dans un avenir où les athlètes peuvent s'épanouir tant sur le plan sportif que financier. Les résultats de ces discussions pourraient non seulement redéfinir le paysage de la WNBA, mais également servir modèle pour d'autres ligues sportives en quête d'équité et de durabilité.
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